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Marie-Pierre Vieu
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11 juillet 2010

Etat d'urgences

Nous sommes entrés dans un été de tous les possibles.

Où le gouvernement non content d’être confronté à une mobilisation et une colère sociales sans précédent, réactivées par le succès de la journée de manifestations du 24 juin, offre aujourd’hui la preuve publique de son lien et de sa soumission à la finance.

Car finalement quelle autre démonstration suggère l’affaire Bettencourt, que celle d’un Parti au pouvoir, l’UMP, directement téléguidé par la classe dominante et dont les premiers responsables sont les chevilles ouvrières du système ; de l’actuel fossoyeur des retraites Eric Woerth, ex Ministre du budget et conjointement trésorier du Parti faisant difficilement la part entre intérêt personnel, partisan et général… au Président de la République Nicolas Sarkozy, qui encore simple candidat, n’a pas hésité à jouer les convoyeurs de fonds pour pouvoir à sa propre élection.

Affaires de famille, aurait commenté le Parrain Vito Corleone, encore que Sarko rappelle plus Mickael que Vito ! Il est vrai qu’on ne sort pas de Neuilly, certes, mais c’est bien de la République qu’il est question !

Évidemment cela est tellement gros, que çà en fait peur ! Pour la seule raison, je viens de l’évoquer, que cette République est en danger et qu’il ne s’agit alors de ne rien commettre d’irréparable, un mot, un geste qui pourraient donner crédit aux extrêmes, à l’anarchie ou au désordre.

Regardez seulement comment la droite réagit au quart de tour, tombant à bras raccourcis sur Médiapart soupçonné de gauchisme puis d’accointances avec le FN; certains n’hésitant pas à aller convoquer pour se justifier le complot Mitterrand/Le Pen. Comme si la gauche était compatible avec le fascisme !

Mais remarquons encore qu’à gauche, il est difficile de porter la bonne estocade. Ainsi le PS se cantonnant dans un discours de circonstance, aux accents moralisants qui sonnent faux, se fourvoie, car il passe à côté de l’essentiel à savoir que nous ne sommes pas dans une séquence politique classique, où il s’agirait seulement d’élever la voix en attendant 2012 et l’alternance.

Au demeurant ce qui éclate aujourd’hui au grand jour de la connivence entre l’argent et la classe politique ne touche pas seulement la droite, mais également une partie de la social démocratie ; ne soyons pas dupes sur les intérêts concourant à la mise en orbite pour ne citer qu’elle, d’une possible candidature DSK.

Non, ce qui se joue dans ce moment, est extrêmement préoccupant. La situation fait furieusement penser aux années 30. Rappelons nous la séquence de l'époque : la crise de 29 du système capitaliste venue des États-Unis. Des scandales politico-financiers telle l'affaire Stavinsky débouchant sur l'émeute fasciste du 6 février 34, puis le sursaut du Front Populaire dans le contexte international de l’époque. On connaît la suite…

Nous sommes aujourd’hui face à un pouvoir aux abois, pris la main dans le sac et donc dangereux car capable de tout. Ainsi cette semaine a été celle de la politique de la terre brûlée : décision d’enterrer le Grenelle de l’environnement avec la décision de réduire les déficits publics, en rognant sur les niches fiscales vertes, réduction voire quasi suppression des aides au logement sanctionnant directement les plus bas revenus, les jeunes et les étudiants, poursuite du saccage des services publics et de leurs missions via les non remplacements en retraites et les suppressions d’emplois programmées touchant les secteurs endémiques de l’école, l’hôpital..

Mesurons nous collectivement le mal qui nous est fait ? Cette fureur souvent encore sourde mais pourtant bien présente, qui a pénétré bons nombres de foyers ?

Nous sommes au bord du gouffre comme de l’explosion populaire. Allons nous banaliser cette souffrance, la laisser être détournée de ses objectifs et délégitimée ? Ou saurons-nous l’affronter telle qu’elle, trouver avec ces hommes et ces femmes les mots et les chemins pour répondre à leurs attentes ?

J’ai accompagné lundi matin dernier, une voisine au tribunal de grande instance de Tarbes. Elle y était convoquée suite à la plainte de l’OPAC 65 (Office public de l’habitat des hautes Pyrénées) pour un impayé de loyer se chiffrant à 900 euros.

Nous nous sommes présentées à 9h et sa situation a été examinée à 10h30 ; entre temps toutes les personnes qui se sont présentées, étaient confrontés à la même situation : le sur-endettement. Madame L… a écopé d’un jugement la condamnant à verser chaque mois 50 euros en supplément de son loyer de 150 euros (sans les APL) jusqu’à résorption de sa dette. Elle perçoit 480 euros de RSA mensuels. Elle ne tiendra pas !

L’OPAC 65 est dirigé par la gauche locale : mais alors que cet organisme est amputé aujourd’hui d’une partie importante des subventions d’état, cette gauche fait le choix de gérer au mieux la situation demandant à ses services de veiller au bon équilibre des recettes et dépenses ; ces services quant à eux demandent alors aux locataires d’être « irréprochables », les mauvais payeurs c'est-à-dire les plus en difficulté sont renvoyés aux huissiers. De fait ils se mettent à cumuler une triple peine : revenus minimum, retard de loyer et risque d’expulsion, frais de justice..

 

Jusqu’à quand ainsi ? Et quels moyens nous donnons nous pour sortir de cette situation ?

C’est à peu près en ces termes que le groupe Front de gauche à la région midi Pyrénées a interpellé le Président Malvy au sujet de la réforme territoriale et de l’élaboration du budget 2011.

S’agit-il pour nous, de dénoncer la politique et les réductions budgétaires imposées par la droite pour ensuite les appliquer et revoir nos propres politiques régionales au rabais en amputant de ci de là quelques secteurs jugés secondaires en temps de crise (la culture, la ville, la solidarité) ou bien s’agit-il pour nous « d’interpeller les habitants de Midi Pyrénées sur le devenir de leur région, de leur donner les moyens d’être acteurs de la riposte que nous voulons opposer à la politique d’asphyxie de l’Etat ? En d’autres termes, comment travaillons nous à ce qu’une institution dirigée majoritairement par la gauche ne se comporte pas comme une chambre d’enregistrement des décisions du gouvernement mais prenne le partie de la résistance et de la contre-offensive ? Et cela dans les actes ?»

« Quand tous les hommes seront libres, ils seront égaux ; quand ils seront égaux, ils seront justes » écrivait Saint Just. J’en reviens au début de mon propos. Dans ces temps agités, il est de première importance de défendre ce qui fait le socle de toute démocratie, la liberté d’expression : de parole, d’écriture, de la presse. Ces dernières semaines deux médias ont résisté à leur manière au rouleau compresseur de la droite : l’Humanité en se refusant, quitte à se mettre en danger financièrement, à publier une publicité pour une réforme des retraites qui n’a encore été votée, Médiapart, site d'information qui a tout simplement bien fait son travail, à savoir informer sur l’affaire Bettencourt.

Aujourd’hui c'est encore l'existence d'une presse démocratique et indépendante de tous les pouvoirs qui est menacée. Sachons ne pas l'oublier.

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Commentaires
C
... mais je prends plaisir à te lire. Bon courage pour tenir ce blog, il est bien que des gens comme toi fassent vivre la démocratie. Elle en a besoin.
Marie-Pierre Vieu
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Marie-Pierre Vieu
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